INTERVIEW : Jonathan Mesini

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Pour ce portrait, nous rencontrons aujourd’hui Jonathan Mesini, manager responsable technique et qualité du Yacht Club de Toulon, et entraîneur compétitif de l’équipe Windfoil.

Véritable passionné d’adrénaline et de sensations de vitesse, John nous raconte comment ses expériences personnelles, professionnelles et son parcours sportif l’ont conduit au métier d’entraîneur d’une équipe compétitive, un métier qui correspond à ses valeurs et qui lui a fait découvrir une discipline dont il est tombé amoureux. 

  • Raconte-moi tes débuts dans le milieu de la voile

En fait, mon parcours scolaire et universitaire est très lié à celui dans la voile. J’ai commencé au Yacht Club de Toulon quand j’avais 5 ans par l’optimist, mes parents m’ont inscrit ici pour les stages de vacances d’été. Au bout de quelques étés, je me suis lassé de l’optimist et je suis passé sur du catamaran. Mon 1er stage, je l’ai fait avec Romain Mourand, qui est aujourd’hui le directeur adjoint du club. Cela fait un moment que je suis là maintenant ! [rires] À l’époque, il a dit à mes parents que j’avais du potentiel et leur a fait comprendre que ça me plaisait vraiment, il a convaincu mes parents de m’inscrire à la voile à l’année. En parallèle de ça, Romain montait une équipe de compétition, je me suis donc retrouvé parachuté dans cette équipe en Hobie Cat 16 et dans la foulée, il m’a inscrit dans le cursus de formation pour devenir saisonnier. Je trouvais ça vraiment sympa, notamment en job d’été, parce que c’est quand même donner beaucoup de responsabilités à un jeune. Au niveau de la pédagogie, c’était aussi très formateur.

À 18 ans, après le baccalauréat, je suis rentré à l’université en STAPS. J’étais à fond dans le sport, la compétition et la performance, je me suis dit que c’était la suite logique. En 2ème année, je me suis spécialisé pour faire du coaching sportif. J’avais également des stages à faire sur la 2ème et 3ème année, que j’ai réalisés au Yacht Club. Mon projet, c’était véritablement la préparation physique de jeunes sportifs en planche à voile 2 fois par semaine. Et en parallèle de mes études, je continuais à donner des cours de voile au club, en tant que préparateur physique pour les jeunes sportifs et moniteur pour l’école de sport. Je travaillais ici tous les samedis matin et après-midi à l’année, donc c’était une bonne expérience. 

À la suite de la licence, j’avais envie d’aller voir ailleurs, j’ai donc quitté le monde de la voile et le club un petit moment pour faire un Master en management du sport, événementiel sportif et gestion des organisations sportives à Paris. Ce master m’a permis d’avoir des opportunités de stage assez importantes, notamment avec Toulon Provence Méditerranée pour l’organisation de la Tall Ships Regatta. C’était un événement de grands voiliers sur lequel j’avais été placé pour gérer l’aspect technique et nautique. C’était extrêmement enrichissant de voir comment fonctionner une politique publique, et également de participer à l’organisation d’un grand événement dans le monde de la voile. Quant à mon stage de 2ème année de master, je l’ai fait à Hyères pour l’organisation de la semaine olympique française de voile. Idem, j’ai été placé sur le côté technique purement maritime, mais en amont, je m’occupais de la recherche de partenariats et de sponsorings pour l’événement. Ça m’a permis de découvrir de nouvelles facettes du monde du sport. 

À l’issue du master, j’ai cherché du travail. J’ai postulé à Décathlon, et j’ai été reçu et pris par la suite en tant que manager à Antibes. J’ai tenu… 7 mois. [rires] Le métier en lui-même était très intéressant : gestion du budget, réalisation d’un projet, encadrement d’une équipe… Pour une première véritable entrée dans le monde du travail, c’était assez incroyable. Par contre, le rythme de travail de 70 heures par semaine dans une « boîte de conserve »… J’ai toujours été dans le monde du sport et de l’ « outdoor », notamment avec des activités annexes à la voile comme du VTT ou du ski en compétition. Donc, être 70 heures par semaine dans un magasin fermé, je me suis vite rendu compte que ce n’était pas fait pour moi.

Finalement, au printemps 2015, je suis allé à l’Union des Centres Sportifs de plein Air (UCPA) de Hyères, qui est une association sportive très importante. Ils ont des centres de vacances de sport en pleine nature aux 4 coins de la France, et même à l’étranger. À Hyères, ils sont spécialisés dans la voile et la plongée, c’est pourquoi je me suis présenté chez eux. À l’époque, ils souhaitaient répondre à un marché public de la ville de Six-Fours, qui avait fait un appel d’offre pour créer une base nautique. Ils m’ont donc proposé le projet avec pour objectif de gagner l’appel d’offre. J’ai donc monté le projet, et par chance ou par talent, on a gagné ! [rires] À la suite de cela, l’UCPA m’a proposé de devenir chef de base pendant la saison estivale de 2015. Le club a très bien marché durant toute la saison et à la clôture, je n’ai plus eu de nouvelles de l’UCPA. Au moins, ça m’a permis d’avoir une grosse expérience sur ce qu’est l’ouverture d’un club et tout ce que ça implique : devis, achats matériels, mise en place d’une structure, recrutement des moniteurs… C’était donc intéressant, j’en garde beaucoup de positif et c’est ce qui me permet aujourd’hui, quand je travaille au Yacht Club de Toulon, de prendre de la hauteur et de comprendre les choix et les décisions que doivent prendre les supérieurs. 

Finalement, pour la saison d’été 2016, j’ai appelé le Yacht Club de Toulon en leur disant que j’étais disponible et que j’aimerais bien revenir pour y travailler. J’ai donc fait la saison dès le mois de mai 2016. À la suite de cela, ils m’ont dit qu’ils recherchaient quelqu’un à temps plein pour l’année pour être entraîneur. C’était parfait pour moi qui souhaitait former des jeunes à la compétition pour retrouver un peu la dynamique que j’avais quelques années auparavant. En plus, cela collait avec l’arrivée du foil au sein du Yacht Club, donc nous nous étions dit que c’était là l’occasion de créer une équipe compétitive en Windfoil. La 1ère année, on a surtout cherché à se former à cette discipline, et à faire des cours particuliers. Quand on a vu que l’engouement pour cette activité était là, on l’a alors proposé au grand public à partir de septembre 2017. En créant l’équipe, en retrouvant un support qui allait vite, ça m’a redonné goût à la navigation et à la compétition. Je me suis donc remis, en parallèle des entraînements avec les jeunes, à faire de la compétition.

En 2018, je suis passé Responsable Technique Qualifié Adjoint au Yacht Club pour soulager Eric Delteil sur les aspects pédagogiques et techniques. Et l’année dernière, il y a eu l’ouverture du Beach Club à Hyères avec Pierre et Romain, sur laquelle j’ai été missionné étant donné que j’avais de l’expérience dans ce domaine. Je dois donc manager, avec Hugo mon adjoint, le Beach Club, la base des Criques ouverte récemment et la base du Gaou Bénat en supervision, en complément des entraînements de Windfoil au Yacht Club de Toulon parce que c’est ce qui me tient à cœur. C’est pour ça que j’ai fait ce métier à la base. Voilà, je crois que j’ai fait le tour ! [rires]

  • Pourquoi le Windfoil plus qu’un autre support ? 

Dans mon expérience personnelle, c’est celui qui me fait le plus vibrer. J’ai fait de l’optimist quand j’étais petit, c’est bien pour commencer parce que tu vis de beaux moments et d’autres où tu as peur, où tu apprends ce que c’est et ce que ça fait de naviguer. J’ai le souvenir de ma cousine et moi sur un optimist dans l’Anse, tous les deux en pleurs parce que les conditions météorologiques étaient violentes. [rires] Je suis rapidement passé sur du catamaran en compétition. J’ai été très frustré en compétition parce que je n’avais pas toutes les clés pour réussir à faire ce que j’avais envie d’accomplir. En plus, faire les déplacements ça m’ennuyait, parce que la logistique du catamaran est assez encombrante : il faut démater, charger, décharger, ça prend beaucoup de temps. Aussi, mon équipier, un très bon ami, n’avait pas autant l’esprit compétitif, ce qui m’a freiné dans la réalisation de mes objectifs. Donc, quand j’ai eu à reprendre une équipe de compétition, tous ces souvenirs me sont revenus. Je voyais aussi le midi les planchistes partir naviguer, et c’était tellement rapide et pratique en termes de mise en place, et ça avait l’air tellement fun. Étant quelqu’un de dynamique, j’avais besoin de ça, et de me retrouver seul pour accomplir ce que je n’avais pas pu accomplir dans le passé, même si j’ai adoré mes années en binôme. Je voulais être maître de ce que je faisais, donc j’ai appris la planche à voile l’été avec les quelques conseils que je pouvais récupérer de ceux qui en faisaient, et j’ai eu une véritable révélation pour ce sport. Depuis mes 18 ans, c’est planche à voile et rien d’autre.

En conséquence, quand le Windfoil est arrivé et qu’on a pu faire de la régate, j’ai sauté sur l’occasion. Personnellement, quand j’ai fait ma 1ère session de Windfoil, j’ai eu l’impression de redécouvrir la planche à voile. C’est ce qui m’a donné envie, de mon côté, d’approfondir la pratique, et également de partager ma passion en tant qu’éducateur. Je rajouterai aussi que j’aime bien l’esprit des « funboarders », un peu… fous dans leur tête : on a conscience des risques de ce sport, mais on y va quand même ! [rires]

  • Est-ce que devenir coach sportif était ta finalité ?

Non, effectivement, c’était plutôt une prise de conscience. Quand j’ai fait moniteur saisonnier pendant ma licence STAPS, je m’étais posé la question, mais je me disais également que je ne voulais pas en faire toute ma vie. C’est aussi pour ça que je suis parti à Paris pour faire mon master en management du sport et événementiel, pour voir de nouvelles choses, découvrir de nouveaux aspects. Finalement, je pense que c’est véritablement l’expérience de Décathlon qui m’a fait avoir ce déclic. Dans chaque métier, il y a des choses moins amusantes. Mais il suffit d’être positif : je ne suis pas sûr que tout le monde a la mer comme bureau. Quand tu es sur l’eau, tu vis des expériences. Il m’est arrivé l’hiver de naviguer sous la neige, c’est peu commun. Le métier d’entraîneur de foil présente aussi des aspects que j’aime par-dessus tout : travailler avec la nature et ses éléments, s’y adapter, et le contact humain, le partage avec les jeunes, les autres moniteurs… Je me suis rendu compte que c’était mon essentiel, tout simplement, et ce grâce à ce que j’ai vécu professionnellement. 

  • Quel est ton plus bel accomplissement personnel ou sportif ? 

De manière générale, on va dire que je suis fier d’avoir eu le courage de partir dans des aventures, peu importe le support. Je pense à des expériences en foil ici où je suis parti à l’inconnu car le foil nous permet de faire des longues distances. Donc, j’avais pris un sac à dos, une bouteille d’eau, un téléphone, et je suis allé là où le vent m’a emmené. Dans ces moments-là, je suis seul avec moi-même, quel que soit mon support vu que je fais aussi ça en vélo ou en ski, et j’improvise. Je me suis retrouvé des fois dans des situations complexes, voire limites, mais c’est ça que je cherche : les frissons, l’adrénaline. Donc, pour mon plus bel accomplissement personnel, je dirai ça effectivement, le fait d’être parti à l’aventure sans avoir peur de ce qui pouvait m’attendre. 

Après, dans le cadre professionnel, j’ai eu un jeune qui a perdu son père, et j’ai été le plus présent possible pour lui, pour l’accompagner au mieux dans une telle situation. Avec lui, j’ai vécu des moments forts, je l’ai entraîné mais pas seulement, je l’ai vu grandir aussi. Finalement, il a continué à percer dans le monde de la planche à voile et aujourd’hui, il est en Pôle Espoir, et peut-être Pôle France. Il est heureux maintenant, il est fier de son niveau et de ce qu’il fait et ça, c’est un accomplissement d’une grande valeur pour moi. 

  • Pourquoi Toulon plus qu’un autre club ? 

Toulon club de cœur, tout simplement. Mes parents sont arrivés ici quand j’avais 3 ans, et ils m’ont mis à la voile quand j’en avais 5, au Yacht Club de Toulon. J’ai fait ma formation de jeune moniteur ici, mes compétitions ici, j’ai fait mes armes ici en quelque sorte, donc c’était une évidence. Je rajouterai qu’en terme de dynamisme, le Yacht Club de Toulon est quand même l’un des meilleurs, et moi qui suis quelqu’un de dynamique, l’état d’esprit du club me convenait parfaitement. 

  • Une anecdote amusante à nous partager quand tu étais en mer ?

J’en ai même plusieurs ! [rires] Pour la première, je devais avoir 16 ans, et j’étais en mer avec mon ancien coéquipier dont j’ai parlé plus tôt. C’était lors d’une régate où il n’y avait vraiment pas de vent et je ne supportais pas quand ça n’avançait pas à l’époque. Encore aujourd’hui, d’ailleurs. J’étais barreur, donc à l’arrière du bateau, et mon équipier était devant à scruter l’avant de la mer. La régate n’était pas spécialement importante et j’en ai eu assez de cette lenteur. Donc sans rien dire et sans faire de bruit, je suis descendu du bateau. Mon coéquipier ne s’en est pas aperçu, donc il a continué à me donner des instructions, à me parler alors que j’étais dans l’eau à le regarder partir. J’ai beaucoup ri, surtout quand il s’est rendu compte que je n’étais plus sur le bateau, je revois encore son visage, c’était mythique. Une petite deuxième aussi, c’était à une régate à Bormes-les-Mimosas, et là pour le coup, il y avait énormément de vent. Le départ a été lancé, mais les conditions étaient tellement extrêmes que la flotte s’est étirée, et les vagues étaient tellement grandes que je ne voyais pas la 1ère bouée qu’on devait passer, et mon coéquipier non plus. On l’a cherché quelques temps, puis ça m’a rapidement ennuyé, pour être poli, et j’ai dit à mon coéquipier : « Tant pis, on va directement à la ligne d’arrivée ! ». C’est ce qu’on a fait, on a passé la ligne d’arrivée 3èmes en n’ayant pas fait le parcours. Ceux qui devaient observés étaient tellement occupés à faire la sécurité vu les conditions dantesques de la régate qu’ils ne pouvaient pas vérifier qu’on avait bien passé la bouée !  

  • Quels sont tes objectifs pour cette saison pour tes jeunes ? 

Je dirai qu’à 50% des jeunes de mon groupe, j’ai un objectif de qualification au Championnat de France, et on est plutôt bien placé au vu des résultats que nous avons faits lors des sélectives. C’est un bon moyen de connaître le niveau général en France, et ça me permet par la suite d’adapter mon travail. Pour l’autre partie de mon groupe, je dirai que l’objectif est de continuer à prendre du plaisir et de donner le meilleur d’eux-mêmes sur le régional. 

Est-ce que tu as des objectifs personnels ?

Avec mes nouvelles missions, forcément oui. Je souhaite une bonne prise en main de ces nouvelles missions et j’espère qu’elles vont m’apporter de nouvelles expériences. Comme chaque année, maintenir le niveau des cours que je dispense aux jeunes. Également, peut-être l’objectif le plus important à venir, c’est la réussite de la nouvelle base nautique Les Criques suite à son ouverture récente.

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